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Syndicat Autonome Tout RATP

AT psychologique à la RATP et reconnaissance du caractère professionnel.

10 Avril 2018, 15:42pm

Publié par SAT-RATP

 

 

Tract du 10 avril 2018

 

ACCIDENT DU TRAVAIL (CHOC PSYCHOLOGIQUE) A LA RATP

ET RECONNAISSANCE DU CARACTÈRE PROFESSIONNEL DE L'ACCIDENT

 

Nous devons tout d’abord rappeler, une bonne fois pour toute, qu’en matière d’accident du travail, ce n’est pas les dispositions de l’article L. 411-1 du Code de la sécurité sociale qui trouvent à s’appliquer aux agents de la RATP, mais celles de l’article 77 du règlement intérieur de la CCAS de la RATP : « l’accident survenu à un agent, aux temps et lieu de travail, est présumé comme imputable au service. Cette présomption est simple. La preuve contraire peut donc être apportée par la Caisse ». (CASS. Civ.2., 11 février 2016, n° 15-10284 ; CASS. Civ.2., 16 juin 2016, n° 15-17437 ;  CASS. Civ.2., 21 septembre 2017, n° 16-1289). 

 

Ainsi il appartient donc à la CCAS de la RATP, qui entend faire tomber la présomption d’imputabilité, de rapporter la preuve que votre accident a une cause totalement étrangère au travail ou est dû à un état pathologique antérieur évoluant pour son propre compte, où en d’autres termes, que la pathologie déclarée lors de votre accident (AT) ne préexistait pas en amont de celui-ci.

 

A défaut de rapporter une telle preuve, la CCAS de la RATP est tenue, au visa du texte susvisé, de reconnaître le caractère professionnel de votre accident et donc, de le prendre en charge au titre des AT, ce qu’au besoin, ne manquerai pas de l’obliger à faire le Tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS).

 

Ensuite, et pour revenir au sujet premier de ce tract, vu l’augmentation exponentielle de la souffrance au travail, vu la multiplication des Déclarations d’Accident du Travail (DAT) pour choc psy, vu les nombreux refus, par la CCAS de la RATP, de prise en charge au titre des accidents du travail, il nous paraît impératif de rappeler les mesures indispensables pour faire reconnaître le caractère professionnel de votre accident.

 

En tous les cas, dès lors que vous établissez lors de votre DAT le lien entre votre accident et le travail, et que votre certificat médical initial (CMI), ainsi que les renseignements médicaux portés sur vos arrêts de travail confirment que votre pathologie psychique est survenue brutalement par le fait du travail déclaré (exemple : suite à un entretien ou échange téléphonique avec votre hiérarchie voire, un collègue), il sera plus que très compliqué pour la CCAS de refuser la prise en charge de votre AT et par suite, d’obtenir en cas de litige du TASS la confirmation de sa décision de refus.

 

D’où l’importance de vos déclarations tant à l’employeur (le fait de procéder vous-même à la DAT à l’avantage de vous permettre d’avoir le temps de choisir au mieux les mots pour décrire au plus juste les circonstances de votre AT et son lien avec la survenue brutal de votre choc émotionnel), qu’au médecin et sapeurs pompiers s’ils sont intervenus. Ne déviez pas des faits, votre malaise, crise d’angoisse ou forte anxiété doit être exclusivement rattaché aux circonstances de l’accident.

 

Voyons maintenant la jurisprudence consacrée à la RATP sur le sujet.

Dans un arrêt récent, concernant un accident déclaré par un agent SEM pour choc psy à la suite d’un entretien avec sa supérieure hiérarchique, il a été jugé que « La caisse ne renverse pas la présomption dès lors qu'elle ne rapporte pas la preuve que l'accident survenu au temps et au lieu du travail serait dû à une cause totalement étrangère au travail ou à un état pathologique antérieur ». (CA de Versailles. 21ème chambre, 6 juillet 2017, n° de RG : 16/4425 § 16/064382. RATP c/ M. X. Arrêt 217-2017)

On relèvera dans cet arrêt deux choses d’importance. La première, c’est que malgré ses dénégations du fait accidentel, selon lesquelles « aucun fait accidentel n’était intervenu avant le malaise de M. X » ; « M. X s’est énervé alors que Madame Y… est restée calme ; le témoignage de M. B… démontre qu’il a quitté les lieux sans signe de malaise »), la RATP n’est pas parvenue à renverser la présomption d’imputabilité et la seconde c’est que peu important que l’entretien se soit déroulé sans élévation de voix ou que l’agent ait quitté les lieux sans signe visible de malaise dès lors qu’à son arrivé sur son lieu de travail, il a ressenti, en raison de l’échange qu’il venait d’avoir avec sa supérieure, un vif malaise entrainant sa chute soudaine sur le sol, le fait accident était imputable au service.

 

Dans un second arrêt, concernant un autre agent de SEM, le fait accidentel de l’AT psy résultait des circonstances suivantes « alors que l’agent avait commencé son service à 4h30 le vendredi 17 octobre 2014, il était invité par sa supérieure hiérarchique à se rendre dès 8h30 à une convocation de l’inspection générale des recettes dont il ne devait ressortir le même jour qu’à 15h50 sans que ne lui soit donné durant son audition la possibilité de manger ou de boire, que le samedi (18) et lundi (20) suivant, et alors qu’il était de repos, il devait subir plusieurs relances du contrôleur de l’inspection des recettes », ce qui avait provoqué chez lui une dégradation brutale de son état de santé tel que l’a retenu la Cour d’appel pour reconnaître le caractère professionnel de l’accident. (CA de Versailles. 5ème Ch. 14 septembre 2017, RG : 16/03139. RATP c/ M. X)

 

Dans un troisième arrêt, concernant un responsable d’équipe d’un centre bus, déclarant un choc psychologique à la suite d’un entretien avec son supérieur hiérarchique, le certificat médical comportait les constatations suivantes : « état de stress aigu secondaire à un harcèlement sur le lieu de travail », la Cour a jugé que « Cet état de choc psychologique, manifesté par des troubles du comportement inhabituels, à l'issue d'un entretien avec un supérieur hiérarchique dont la teneur et les modalités étaient imprévisibles pour la salariée, caractérise une lésion soudaine et brutale constitutive d'un accident survenu aux temps et lieu du travail » (CA de Versailles. 21ème Ch., 22 juin 2017, n° de RG : 15/02681. CCAS de la RATP c/ Mme A) On relèvera ici que pour tenter d’écarter tout fait accidentel, la RATP a plaidé, comme dans l’arrêt DG cité supra, le fait que l’entretien s’était déroulé sans que les protagonistes n’aient élevé le ton. Ce à quoi la Cour a répondu que ce n’était pas le ton de l’échange qui était en cause, mais le contenu et la teneur de celui-ci.

 

Dans un quatrième arrêt, concernant un agent animateur mobile qui avait déclaré deux chocs psychologiques à la suite d’entretiens avec son supérieur hiérarchique (en 2009 et 2010), la RATP contestait la reconnaissance par le TASS de Paris du caractère professionnel des 2 AT au motif principal que s’appuyant sur les déclarations du supérieur hiérarchique, les entretiens s’étaient déroulés normalement « sans tension particulière » et que la salariée était repartie « tranquillement ».  Cependant, pour confirmer le fait accidentel des 2 AT, la Cour d’appel de Paris a relevé qu’à la sortie du premier entretien la salariée s’était assise et mise à pleurer ce qui avait nécessité sa conduite par les sapeurs pompiers aux urgences de l’hôpital où le médecin constatait « crise d’angoisse, anxiété » que ce diagnostic était confirmé par un autre certificat médical (le CMI établi par le médecin traitant) qui faisait état d’un « syndrome anxieux ; spasmophilie » ; concernant le second AT le fait accidentel consistait en « une crise de nerf » consécutive à un entretien au sujet des horaires de travail de salariée (elle était en mi-temps thérapeutique avec la préconisation médicale d’un repos 0) que sa hiérarchie refusait de respecter entrainant crise de larmes chez la salariée. Sous le choc celle-ci était repartie chez elle en Bretagne où son médecin traitant constatera « harcèlement au travail, craque nerveusement suite aux difficultés et incompréhension de sa cadre qui ne l’aide pas pour ses soins ». (CA de Paris. Pôle 6, Ch.12., 19 novembre 2015, n° de RG : S 12/07590. CCAS de la RATP c/ Mme B. Arrêt n° 1478)

 

Dans un cinquième arrêt, concernant un machiniste, la Cour a jugé que « la présomption d’imputabilité de ce choc psychologique aux propos agressifs et menaçants de Monsieur … [supérieur hiérarchique de la salariée à laquelle il reprochait d’être en avance sur son parcours] et aux relances téléphoniques de ce dernier au temps et lieu du travail doit être retenue ; que l’organisme de sécurité sociale n’établit pas que la lésion médicalement constatée est sans rapport avec cet évènement ; qu’il y a lieu en conséquence de reconnaitre le caractère d’accident du travail aux faits survenus …» ( CA de Versailles. 5ème Ch., 1er septembre 2011, n° de RG : 10/02572. Mme C c/ CCAS de la RATP. Arrêt n° 506)

 

Dans un sixième arrêt, concernant l’accident pour choc psychologique, en l’espèce une crise d’angoisse survenue, un agent de sécurité de SEC à la suite de l’exercice de son droit de retrait (sa direction lui demandait d’effectuer un transport de fond sans la protection d’un gilet pare-balles) et de la demande de sa hiérarchie de venir signer le registre des avis de danger grave et imminent. Bien que ce droit de retrait ait été exercé sans difficulté particulière pour le salarié comme le soulignait la CCAS, la Cour d’appel a cependant jugé pour retenir le fait accident que  « si la RATP l'a laissé exercé son droit de retrait, en lui demandant de venir au bureau pour signer le registre des avis de danger grave et imminent, il n'en résulte pas pour autant que l'intéressé n'a ressenti aucun stress ou angoisse face à cet événement » et retenait qu’un représentant syndical attestait qu’à la sortie du bureau de l’IPS l’agent s’était plaint d’un « fort mal de tête et d’une accélération du cœur et d’avoir du mal à respirer », qu’il ajoutait que l’agent paraissait faire une « forte crise d’angoisse » ; que cet état d’anxiété était confirmé par le service de consultation de l’hôpital qui a prescrit un arrêt de travail en raison d’ « angoisses réactionnelles » et par un certificat médical (CMI) faisant état de « bouffées d’angoisse et trouble du sommeil » ; enfin la Cour retenait « qu'indépendamment des faits de harcèlement moral, il existe bien un événement précis survenu le 15 janvier 2008 ayant justifié la mise œuvre par le salarié de son droit de retrait ; que l'exercice non contesté de ce droit supposant un danger immédiat ou imminent, cette situation de danger constitue un fait précis parfaitement identifiable et susceptible de provoquer à lui seul un état d'angoisse chez le salarié qui y est confronté ». (CA de Paris. Pôle 6. Ch.12., 9 octobre 2014, n° de RG : S 11/09274. CCAS de la RATP c/ M. X)

 

L’ensemble de ces arrêts -- qui sont à la disposition de tout agent qui nous en ferait la demande -- démontre qu’un choc psychologique survenu à la suite d’un entretien professionnel peut-être imputable au travail quand bien même l’échange semble s’être passé normalement, sans élévation de voix, et hors temps et lieu du travail.

 

Nous conseillons donc vivement à l’agent victime d’un choc psychologique :

 

  1. de procéder dans les 24h00 -- pour bénéficier de la présomption d’imputabilité -- à votre propre déclaration d’AT (Cerfa disponible sur le site ameli.fr) dont un volet devra être adressé à votre direction et un autre (avec le CMI) à la CCAS ( par lettres recommandées avec AR et pour plus de sécurité encore, accompagné d’une lettre faisant état des pièces jointes (DAT et CMI). Il n’est pas rare que la CCAS prétende n’avoir rien reçu  et que la direction ne retranscrive pas vos exactes déclarations aux fins de disculper sa hiérarchie de toute faute (surtout en matière psy) et faire ainsi obstacle à la prise en charge de votre AT.

 

  1. de faire constater dès que possible le choc émotionnel par un professionnel de santé (service de consultation de l’hôpital, médecin traitant voire, médecin du travail). Et si le choc émotionnel a été violent, pour votre santé et sécurité, ne pas hésiter à solliciter l’intervention des sapeurs pompiers qui ne prendront aucun risque et vous conduiront aux urgences de l’hôpital le plus proche, vous garantissant ainsi un premier constat médical. Veiller à expliquer à l’interne tout ce qui s’est passé en essayant de circonscrire les faits au seul entretien ou échange téléphonique ayant suscité le violent choc émotionnel ressenti. Plus vous écarterez de ce seul évènement, et plus la CCAS saisira cette opportunité pour invoquer « un état pathologique préexistant à l’accident » et ainsi tenter de renverser la présomption d’imputabilité.

 

  1. de recueillir les témoignages de collègues ayant assistés à l’échange ou ayant constatés votre état d’anxiété intense à la sortie de l’entretien ou de l’échange téléphonique.

 

  1. de veiller à ce qu’il soit mentionné sur l’arrêt de travail, ainsi que sur le certificat médical initial (CMI), que l’accident est causé par la brutale altération de vos facultés mentales, en relation avec les événements invoqués.

 

Retenez également que vous pouvez faire une DAT pour choc psychologique -- dès lors qu’il résulte un malaise, angoisse, forte anxiété, dépression nerveuse -- en raison notamment :

 

  • du ton humiliant ou insultant voire, agressif, employé par un collègue ou supérieur hiérarchique à votre égard sans que ses fonctions ou la mission qui lui a été confiée ne le justifie,

 

  • du contenu et de la teneur de l’entretien avec votre supérieur hiérarchique (Cass. Civ.2., 4 mai 2017, n° 15-29411. Légifrance)  voire, du contenu et de la teneur d’un courrier ou mail qu’il vous a adressé (exemple : lettre de sanction non-justifiée ; mail de reproches injustifiés ou vous incombant une surcharge de travail injustifiée ou des missions sans rapport avec vos fonctions) en ce cas viser dans votre DAT la date de réception du courrier ou mail.

 

  • du refus de votre hiérarchie de faire droit à votre demande d’information des mesures prises pour préserver votre santé physique et mentale (il s’agit d’un droit fondamental du salarié). Viser dans votre DAT la date du refus (verbal ou écrit).

 

Et ce quand bien même votre choc émotionnel interviendrait hors temps et lieu de travail.

 

En effet, Il a été jugé qu’une dépression nerveuse apparue soudainement deux jours après un entretien d'évaluation, au cours duquel avait été notifié au salarié un changement d'affectation, et consécutive, à cet entretien, devait être prise au titre des accidents du travail (Cass. Civ.2., 1er juillet 2003, n° 02-30576. Bulletin 2003 II).

 

Ne vous laissez plus spolier de vos droits par la CCAS de la RATP. Pour plus d’information sur vos droits, pensez à vous abonner à notre newsletter sur notre blog (http://autonome.over-blog.com)

 

Pour vous servir, le SAT-RATP                                                                       

Le tract en version PDF

Commenter cet article
R
J'ai gagné au TGI pour 3 rechutes d' AT, <br /> Ils font toujours appel pour faire trainer les choses et decourager les agents. <br /> J'irai jusqu'au bout!!!
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R
Ce n'est pas normal
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M
Les accidents du travail sont presque systématiquement contestés c’est fou.
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S
c'est pour cela qu'il ne faut vous laisser spolier de vos droits
A
Je suis allé jusqu’au Tribunal des affaires sociales et j’ai gagné mon accident du travail est bien un accident du travail.
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S
bravo à toi ! Nous serions intéressés à lire ton jugement si tu veux bien nous le transmettre.