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Syndicat Autonome Tout RATP

La nullité des réformes prononcées au visa article 98 du statut du personnel RATP

12 Décembre 2017, 11:24am

Publié par SAT-RATP

 

Les décisions de réforme prononcées au visa de l'article 98 sont nulles !

 

Je rappellerai tout d’abord, pour ceux qui n’auraient pas lus mes précédents éditos, que la rupture du contrat de travail prononcée par voie de réforme constitue un licenciement au sens du code du travail dès lors que l’agent ne perçoit pas une pension de retraite à taux plein mais seulement, une pension de retraite proportionnelle (pension de réforme). 

 

Je rappellerai ensuite que le président directeur général, ou son délégataire, ne peut, conformément au décret 59-1091 du 23 septembre 1959 portant Statut de la RATP (art. 8), gérer le personnel que « dans les conditions impliquées par le statut de celui-ci ». 

 

Ainsi le président de la RATP, ou son délégataire, ne peut légalement prononcer la réforme des agents inaptes définitifs à tout emploi à la RATP (et il en est de même pour les agents inaptes définitifs à leur emploi statutaire) que dans les conditions impliquées par les articles 43, 50, 94, 95 et 98 du statut du personnel RATP.

 

Ou en d’autres termes, la cessation des fonctions par voie de réforme (visée à l’article 43) ne peut être prononcée par la Régie que sur proposition de la commission médicale (art. 50) après qu'elle se soit prononcée (en application des articles 94 et 98) sur leur inaptitude à tout emploi à la RATP et sur leur réforme.

 

Tout en rappelant l’obligation pesant sur la RATP, en application des articles 94 et 95 du statut, de s’assurer que l’agent a bien été préalablement déféré à la commission médicale, et que les délais et voie de recours lui ont bien été notifiées avec la décision de réforme.

 

En cas de violation, par l’entreprise, des règles strictes instituées par le statut, la mesure de réforme est nulle et de nul effet. 

 

Il n'est pas inutile de rappeler par l'occasion que la RATP ne saurait s’autoriser à croire, comme elle le fait, qu’elle serait légitime à interpréter isolément les dispositions statutaires afin de tenter de faire revêtir un quelconque caractère légal à ses décisions de réforme litigieuses prononcées au visa de l’article 99 du statut.

 

En effet, à la lumière des dispositions de l’article 1189 du code civil (ancien article 1161) toutes les dispositions statutaires s’interprètent les unes par rapport aux autres en donnant à chacune le sens qui respecte la cohérence de l’acte tout entier.

 

Or, si le titre VI du statut du personnel définit la situation des agents en position de maladie – maternité – accident du travail – inaptitude à l’emploi statutaire, en revanche, seul le titre IV dudit statut définit les conditions de cessation des fonctions des agents.

 

La fin des fonctions par voie de réforme, ne peut se faire légalement que dans les conditions impliquées par l’article 50 du statut, c’est-à-dire, sur proposition de la commission médicale. 

 

Le chapitre 7 du titre VI du statut du personnel, relatif à la situation des agents en position d’inaptitude à leur emploi, n’est là que pour énoncer les compétences de chacun.

 

La médecine du travail est seule compétente pour prononcer l'inaptitude de l'agent à l'emploi statutaire (art.97) et la commission médicale est seule compétente pour se prononcer sur l’inaptitude définitive de l'agent à tout emploi à la RATP et sur sa réforme (art.98).

 

Et s'agissant de l'article 99 visé à ce chapitre, il n'est là quant à lui que pour définir les conditions de reclassement des IDES (inaptes définitifs à l'emploi statutaire). L'Instruction Générale n° 6, prise en application de cet article, définit quant à elle, la composition et les attributions de la commission de reclassement. 

 

En cas de refus, par l’agent, du reclassement proposé ou en cas d’impossibilité de reclassement, celui-ci doit être obligatoirement déféré à la commission médicale visée aux articles 50, 94 et 98 du statut du personnel afin que celle-ci se prononce sur son inaptitude à tout emploi à la RATP et sur sa réforme.

 

Ce que prévoyait très explicitement l’ancienne instruction générale n° 6/VII en vigueur jusqu’au 28 février 2017, abrogée et remplacée depuis (dans la totale indifférence de vos syndicats, sauf du SATRATP qui sollicite son abrogation) par l'IG 6 A du 1 mars 2017 qui ne garantie plus la même protection aux inaptes. 

 

Je reviendrai dans mon prochain édito sur les dispositions de ces deux versions de l’IG 6 et je vous expliquerai en détail pourquoi la nouvelle version de l'IG 6 leur est défavorable et pourquoi donc nous entendons solliciter en justice son annulation.

 

Mais pour revenir au cas des agents réformés au visa de l’article 98 du statut, en raison de leur inaptitude définitive à tout emploi à la RATP, ces derniers se demandent peut-être en quoi leur réforme est nulle, dès lors qu’ils ont été déférés à la commission médicale.

 

 

En premier lieu, je rappellerai que l’agent ne peut être déféré à la commission médicale s’il se trouve en congé de maladie.

 

L’employeur ne peut rompre le contrat de travail d’un agent placé en arrêt maladie quand bien même, celui-ci serait déclaré par la commission médicale inapte définitif à tout emploi à la RATP, dès lors que la rupture du contrat de travail durant la suspension dudit contrat (ce qui est le cas des périodes d’arrêt maladie ou d'AT-MP) n’est autorisée par le code du travail qu’en raison d’une faute grave ou lourde commise par le salarié. 

 

Chacun aura bien compris que l’inaptitude l’emploi statutaire et/ou à tout emploi, n’est pas fautif !

 

Toute réforme prononcée durant un arrêt maladie est donc nulle et de nul effet.

 

 

En second lieu, l'agent réformé doit vérifier que durant la procédure de réforme et particulièrement lors de son déferrement à la commission médicale, il a bien été mis en capacité de faire valoir ses droits.

 

Il s’entend en effet aisément qu’aucune décision médicale ayant pour conséquence la rupture du contrat de travail ne saurait valablement être prise sans que l'agent concerné n’ait été préalablement mis en capacité de faire valoir ses droits.

 

Ainsi, l’employeur, la RATP, a l’obligation, préalablement à la comparution de l’agent devant la commission médicale, de lui rappeler dans la lettre de convocation, ses droits : 

 

a) de consulter l’ensemble des éléments qui seront soumis à la commission médicale et d’en obtenir directement la copie aux fins de préparer sa défense (cette communication devant intervenir suffisamment tôt pour que l’agent puisse bénéficier du temps nécessaire à la préparation de sa défense), 

 

b) de se faire assister par un représentant du personnel de son choix,

 

c) de se faire assister par médecin-conseil de son choix afin d’être en mesure d’analyser les éléments d’ordre médical le concernant et donc, d’apprécier si ceux-ci sont de nature à lui permettre ou non d’occuper un autre emploi à la RATP, et de présenter toutes observations, ou demandes d’ordre médical, utiles par exemple :

 

- solliciter des examens médicaux complémentaires, ou expertise médicale spécifique, aux fins de déterminer si un traitement ou une médication peut améliorer son état de santé et lui permettre ainsi d’occuper un autre emploi à la RATP ou au sein de l’une des filiales du groupe auquel elle appartient,

 

- solliciter une formation en vue d’acquérir les aptitudes et capacités requises pour l’un des postes vacant à la RATP ou au sein de l'une des filiales du groupe auquel apparient l’entreprise, 

 

- demander à évaluer si son état de santé et les restrictions médicales émises par le médecin du travail sont compatibles avec un emploi sur poste en télétravail à la RATP ou au sein de l’une des filiales du groupe auquel elle appartient.

 

Ainsi à défaut de lui avoir rappelé ses droits, de l’avoir mis en capacité d’organiser sa défense, d’avoir recueilli ses explications et/ou celle de son médecin-conseil (celles-ci devant figurer sur le PV établi par la commission médicale) et de lui avoir donné la parole en dernier, la mesure de réforme est nulle et de nul effet puisque prise en violation de la liberté fondamentale des droits de la défense prévue par l’article 6-1 de convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales.

 

La Cour européenne des droits de l’homme juge en effet que la procédure à l’issue de laquelle le droit de continuer une profession est mis en jeu, entre dans le champ d’application de l’article 6-1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales (CEDH, 23 juin 1981, n° 6878/7, M. Le compte Van Leuven et De Meyer c/ Belgique).  

 

Partant, j’invite tous les agents réformés à réclamer auprès de la CCAS, le procès verbal établi par la commission médicale sur leur réforme afin qu’ils puissent constater eux-mêmes, comme nous avons pu le constater, qu’aucune mention de leurs explications n’est rapporté dans le procès verbal, lequel ne précise pas davantage si la parole leur a été donnée en dernier, alors que leur place était en jeu !

 

 

En troisième lieu, les mesures de réforme prononcées au visa de l’article 98 du statut du personnel sont entachées d’un vice de forme substantiel dès lors que :

 

1°) la commission médicale n’est plus régulièrement constituée depuis au moins le mois de novembre 2010, tel que le rapporte la directrice de la CRP-RATP, Nathalie DROULEZ, dans une lettre de réponse du 30 avril 2015, laquelle elle précise que depuis cette date, ne siège plus de médecin-conseil de la CRP-RATP au sein de la commission médicale de la CCAS-RATP

 

Ce qui est contraire aux dispositions de l’article 13, alinéa 2, du Règlement des retraites du personnel de la RATP issu du décret n° 2008-637 du 30 juin 2008 : «  II. – La décision de mise en réforme est prise par la régie après consultation de la commission médicale prévue par le statut du personnel de la régie, au sein de laquelle siège en outre au moins un médecin-conseil de la caisse de retraites du personnel de la régie. Cette décision prend effet sauf opposition motivée du directeur de la caisse formulée auprès de la régie dans un délai de quinze jours ou appel interjeté par l’intéressé dans les conditions prévues à l’article 95 du statut du personnel de la régie dans sa rédaction annexée au présent décret. Il est procédé à la liquidation d’une pension de retraite immédiate quelle que soit la durée de services accomplis par l’assuré au moment de la cessation de ses fonctions à la régie. »

 

Or, si le médecin-conseil de la CRP ne siège plus à la commission médicale, il ne peut donc pas se prononcer sur l’inaptitude définitive de l’agent à tout emploi à la RATP, ni sur sa réforme, ni même rendre le moindre avis au directeur de la CRP sur le bien fondé médical de la réforme. 

 

De fait, en autorisant la commission médicale à siéger dans une composition qui ne respecte pas les dispositions réglementaires applicables, la CCAS-RATP viole le principe du contradictoire.

 

Il faut bien comprendre dans cette affaire qu’à l’issue de l’expertise médicale réalisée par la commission médicale, l’assureur (la CRP-RATP) peut être conduit à devoir liquider la pension de retraite proportionnelle (pension de réforme) à laquelle l’agent peut prétendre s’il ne remplit pas les conditions d’âge et d’ancienneté pour la liquidation d’une pension de retraite à taux plein.

 

Aussi, il est normal et obligatoire que la CRP-RATP, par le biais de son médecin-conseil, participe à l’évaluation médicale de l’agent déféré à ladite commission.

 

 

2°)  la commission médicale ne se prononce plus sur la réforme des agents.

 

En effet, à notre plus grande surprise, je dois bien l’avouer, le procès verbal établi par la commission médicale ne fait plus état de son avis sur la réforme de l’agent déféré.

 

La commission n’est soumise qu’à la question l’inaptitude définitive de l’agent à tout emploi à la RATP mais plus à celle proprement parlé de sa réforme, ce qui est contraire aux dispositions des articles 50 et 94 du statut du personnel.

 

Et pour tous les agents réformés au visa de l’article 98 qui douteraient de ce fait, je les invite une nouvelle fois à réclamer auprès de la CCAS de la RATP le procès verbal établi par la commission médicale sur leur réforme.

 

Et si la Caisse venait à s’opposer à votre demande légitime, il conviendra alors de lui demander de se justifier au regard :

 

- de la communication, par la CCAS-RATP, d’un tel document, par lettre recommandée n° 1A 108 992 7142 9 du 17 avril 2015 à un agent qui lui avait formulé exactement la même demande,

 

- de l’article 1111-7 du code de la santé publique, selon lequel toute personne est en droit d’accéder directement à l’ensemble des informations concernant sa santé détenu, à quel que titre que ce soit, par des professionnels de santé ou des établissements de santé (et dont les caisses de sécurité sociale),

 

- de l’avis favorable rendu par la commission d’accès aux documents administratifs lui rappelant que dans la mesure où les documents sollicités ont été produits ou reçus par la caisse de coordination aux assurances sociales, ils revêtent le caractère de documents administratifs au sens de l’article 1 de la loi du 17 juillet 1978 (avis CADA n° 20113272 du 8 septembre 2011 sur la demande de communication de la copie de l’entier dossier administratif et médical constitué à la suite de son accident du travail),

 

- de sa condamnation, par le Tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris, à communiquer à un agent, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, les éléments de son dossier médical, en l’espèce, le rapport établi par les services du contrôle médical et le rapport d'évaluation du taux d'incapacité permanente partielle -- étant précisé que le PV établi par la commission médicale constituant également un élément du dossier médical de l'agent --. (TASS de Paris, 11 février 2010, n° 09/06006. M. VOISIN c/ CCAS-RATP).

 

Ainsi, à moins de vouloir vous discriminer, la CCAS devrait vous fournir, sans trop de difficulté, le PV de votre commission médicale, dans le cas contraire n'hésitez pas à me contacter.

 

 

3°) les agents sont rarement voire, jamais, informés de l’avis que compte rendre la commission médicale au président de la RATP, ou à son délégataire, sur leur réforme (aucune notification ne leur est faite en ce sens).

 

 

4°) la décision de réforme médicale, prise à la suite de l’avis rendu par la commission médicale, comporte rarement les voies et délais de recours.

 

Ce qui est contraire aux dispositions de l’article 95 du statut du personnel et de l'article 121 du règlement intérieur de la CCAS de la RATP et contraire à ce qui était pratiqué pour certains agents, comme cela a été le cas pour l'agent Alain Cavalier pour ne citer que lui.

 

 

5°) la rupture du contrat de travail par voie de réforme médical, n’est pas prononcée par l’employeur comme il se doit, mais par la CCAS (!)  

 

Vérifier « l’entête » de votre lettre de réforme, dans de nombreux cas, c’est bien une lettre émanant de la CCAS de la RATP. 

 

Or, la rupture du contrat de travail, qu'il soit pour motif de réforme ou autres, ne peut être légalement prononcée que par l’employeur, la RATP, et non par sa caisse de sécurité sociale, qui soit dit en passant, n’a pas, et n’a jamais eu, la moindre compétence ou autorité pour ce faire.

 

Les agents de la RATP ne sont pas embauchés par la CCAS de la RATP, qui rappelons-le n'a pas la qualité de personne morale, mais par la RATP en sa qualité d'employeur !

 


Il ressort de l'ensemble de tout ce qui précède que les agents réformés (que ce soit au visa des articles 98 ou 99) dans des conditions qui ne respectent pas le statut du personnel de la RATP, à valeur réglementaire, sont fondés à solliciter en justice la nullité de leur réforme et par suite, leur réintégration avec toutes les conséquences de droit sur les salaires et accessoires (primes mensuelles de base, prime ACD, prime ATNTM, prime de 13ème mois, prime d'intéressement etc.) les congés, les TC, les fériés, la carrière et la retraite.

 

Et pour tous ceux qui ne souhaiteraient pas, pour des raisons personnelles, solliciter leur réintégration, sachez que vous pouvez solliciter des dommages et intérêts

 

Pour vous servir. 

RB.

 

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Partagez au maximum cet édito avec vos collègues par mail, par facebook (il est téléchargeable en format PDF sur le blog), vous participerez ainsi à la révolution syndicale en marche et nécessaire à la RATP pour que vos droits soient respectés. 

 

Soyez persuadés que vous ne serez défendus par vos syndicats que si vous êtes vous-même en capacité de vous défendre. Et croyez bien que si votre niveau de compétence juridique monte, les dirigeants de vos syndicats ne pourront pas l’ignorer et seront contraint de faire le job pour lequel vous les avez élus ou maintenus en fonctions.

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E
je vais m'empresser de faire suivre aux agents ses excellentes informations qui concernent certains et demain peuvent tous nous concerner. Au moins là, nous saurons nous défendre et faire payer à la RATP ses graves manquements.<br /> Merci à vous
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